On rencontre souvent des troubles psychiatriques et psychosomatiques. Elles doivent donc être incluses dans le diagnostic différentiel. Le traitement est essentiellement psychothérapeutique. Les cliniques proposent des approches multidisciplinaires intensives.
Les troubles psychosomatiques sont extrêmement fréquents dans la pratique de la médecine générale et sont souvent à l’origine de traitements lourds et de souffrances chroniques.
Le terme “psychosomatique” se focalise sur le fait que presque tous les troubles psychiques (par ex. les troubles anxieux, les dépressions, les troubles somatoformes) présentent de nombreux symptômes psychovégétatifs qui laissent d’abord penser à la personne concernée qu’elle souffre principalement d’un problème physique. De même, les troubles mentaux entraînent des comportements qui favorisent les maladies physiques secondaires (par exemple, les troubles alimentaires, les comportements addictifs ou la malcompliance en cas de comorbidités somatiques). Inversement, des maladies physiques primaires peuvent déclencher des troubles psychologiques secondaires au cours de leur évolution (par exemple, des troubles de l’adaptation en cas de cancer ou d’autres affections chroniques affectant fortement la qualité de vie).
Ce qui complique les choses, ce sont les traits de personnalité ou les circonstances psychosociales qui, dans certaines configurations, réduisent la capacité d’une personne à faire face à la situation au point de provoquer une décompensation.
La psychosomatique en médecine et dans la société
Fondamentalement, on peut affirmer que toute la médecine est en fait “psychosomatique”, sans oublier les aspects sociaux, culturels et l’histoire de vie de chaque personne. Il est également essentiel d’observer que, malgré toutes les campagnes d’information, les phénomènes psychiques sont toujours stigmatisés (à la fois socialement et intrapsychiquement, c’est-à-dire les sentiments subjectifs de culpabilité et de honte face aux problèmes psychiques) et que, par conséquent, dans de nombreux cas, ils ne sont pas signalés spontanément. De même, la connaissance des circuits fonctionnels psychovégétatifs fait défaut, de sorte que les patients soupçonnent souvent des maladies physiques liées à l’anxiété et considèrent les liens psychologiques comme improbables.
Il n’est pas toujours facile pour un médecin de décider clairement de la quantité d’examens somatiques et diagnostiques qui sont utiles et appropriés.
Communication
Une compétence très importante dans l’action du médecin (de famille) est la capacité à communiquer en fonction de la situation. L’entretien motivationnel de Miller et Rollnick, par exemple, est un concept utile, facile à comprendre et à apprendre. Celle-ci est basée sur une attitude fondamentale de respect, d’égalité entre le médecin et le patient, c’est-à-dire une relation d’égal à égal. En tant que médecin, il est essentiel de ne pas interpréter trop rapidement et de ne pas présenter de solutions, mais de prendre plus de temps (en termes relatifs) pour écouter ouvertement et saisir les motivations, les objectifs et les propres ressources du patient. Les questions ouvertes et les commentaires sans jugement de valeur sont des éléments qui peuvent modifier de manière décisive l’atmosphère d’une conversation et dont il est prouvé qu’ils ne font pas perdre plus de temps au quotidien. Un patient qui se sent ainsi peut-être moins pressé prend davantage confiance, rapporte des détails décisifs et développe lui-même des initiatives d’action.
Approches de traitement
Les patients qui finissent par suivre un traitement “psychosomatique” sont souvent encore gênés, sceptiques et anxieux-soucieux face à cette approche psychothérapeutique inhabituelle. Il est essentiel d’identifier avec précision tous les facteurs internes et externes, les contraintes et les ressources. Une évaluation diagnostique précise est également effectuée par un médecin ou un psychologue spécialisé, car de nombreux troubles mentaux profonds (comme les psychoses ou les démences) commencent insidieusement par des symptômes non spécifiques et doivent donc être évalués avec précision. Au début d’un traitement, l’accent est mis sur l’établissement de la confiance et la transmission d’un modèle compréhensible du trouble. Le patient est encouragé à observer les symptômes, le comportement et les facteurs conditionnels afin de pouvoir les classer progressivement. L’objectif des approches comportementales, par exemple, est de parvenir à une modification progressive des directives internes, des jugements mentaux et des comportements non réfléchis par le biais d’une analyse de la situation dans laquelle les pensées, les sentiments, les symptômes physiques et les aspects comportementaux sont exposés en détail. Il devrait en résulter une plus grande marge de manœuvre, un répertoire de comportements plus différencié et une plus grande liberté intérieure – un pilier essentiel de la stabilité psychique.
Cliniques psychosomatiques
Les cliniques psychosomatiques proposent des concepts de traitement multimodaux qui, outre la psychothérapie médicale et psychologique, comprennent de nombreuses offres centrées sur le mouvement et le corps. Les offres d’art-thérapie sont également considérées comme très efficaces par de nombreux patients, notamment la thérapie par la création et la peinture, la musicothérapie ainsi que la thérapie par le mouvement et la danse. L’expression artistique, qui n’est pas principalement basée sur le langage, peut souvent déclencher des processus émotionnels intenses et donner des impulsions très importantes pour la psychothérapie. Les cliniques offrent l’avantage décisif d’un traitement coordonné en équipe avec des échanges interdisciplinaires réguliers.
Les antécédents médicaux sont explorés avec précision et les examens somatiques complémentaires nécessaires sont organisés. Un diagnostic différentiel précis de la psychopathologie est élaboré par le psychiatre et le psychologue, puis un plan de traitement est établi avec les interventions psychothérapeutiques appropriées. Comme nous l’avons mentionné, une période suffisamment longue est souvent nécessaire pour la formation de la motivation et la psychoéducation (information sur le contexte du trouble mental). Parallèlement, des séances de kinésithérapie, d’ergothérapie et de thérapie d’activation commencent à promouvoir le mouvement, l’action et la relaxation et, en fonction du niveau de départ des patients, contribuent si possible de manière continue à de petites expériences de réussite. L’art-thérapie est également personnalisée. On y trouve notamment de très bonnes approches pour le traitement des traumatismes psychologiques qui précèdent de nombreux troubles. En complément, des conseils nutritionnels (combinés à une cuisine équilibrée et spécialisée) et des conseils sociaux sont proposés en fonction de la situation.
Il est également important de bien planifier la procédure après la sortie du patient, afin que les résultats du traitement hospitalier ne disparaissent pas immédiatement dans la vie quotidienne. L’implication de l’environnement social, de l’employeur et d’autres personnes de référence importantes doit toujours être recherchée. Les thérapies complémentaires (p. ex. ergothérapie au domicile du patient, soins psychiatriques à domicile, job-coaching, psychothérapie ambulatoire) sont fixées de manière optimale lors du premier rendez-vous à la sortie. La poursuite de l’art-thérapie est parfois très précieuse et possible pour les patients bénéficiant d’une assurance complémentaire ou sur demande auprès de la caisse d’assurance maladie. Il est essentiel, dans la mesure du possible, de discuter au préalable de la réinsertion professionnelle progressive avec l’employeur.
L’offre de cliniques psychosomatiques n’est pas la même partout. Il vaut souvent la peine, surtout pour les cas complexes, de contacter directement (par téléphone) la clinique. Dans de nombreux cas, des entretiens préliminaires ambulatoires sont également proposés pour planifier le traitement.
Aspects politiques et économiques
Le domaine de la “psychosomatique” est en pleine mutation : les maladies qui en relèvent ou les troubles psychiques en général sont de plus en plus identifiés comme des affections qui entraînent d’énormes frais médicaux, des arrêts de travail et des mises à la retraite chez des personnes généralement jeunes. Par nature, il n’existe toutefois pas de traitements entièrement standardisables et calculables (en termes de coûts).
Ces dernières années, les programmes de traitement psychosomatique sont de plus en plus souvent proposés par les grands hôpitaux psychiatriques et l’offre traditionnelle de rééducation psychosomatique en milieu hospitalier est parfois remise en question. Il en résulte, entre autres, des tentatives de concurrence et de lobbying peu reluisantes. L’idée du législateur est d’associer clairement les pathologies aux parcours de soins. En fait, dans de nombreux pays du monde, cette distinction n’est même pas faite et on parle plutôt de troubles mentaux (OMS, CIM-10). Les indications des organismes payeurs telles que “le patient souffre de troubles mentaux et doit donc être traité dans un hôpital psychiatrique” sont l’expression d’une volonté de standardisation, mais passent très souvent à côté des besoins des personnes concernées.
Ces dernières années, les assurances sociales (p. ex. l’AI) semblent souvent porter un jugement de valeur sur les personnes concernées (dans les expertises, les révisions et les suppressions de rentes) et suscitent en premier lieu l’incompréhension, voire le désespoir, ce qui entraîne souvent un surcroît de travail pour les soignants.
Dans l’ensemble, on constate que les troubles psychiatriques et psychosomatiques sont très fréquents et revêtent une grande importance en termes de santé publique et de politique sociale en raison de leurs coûts élevés (traitement, perte de travail, invalidité). Souvent, les patients sont déjà nettement chronicisés au moment du diagnostic ou lorsqu’ils acceptent un traitement spécialisé, et le traitement se complique. Il existe des directives de traitement claires et bien évaluées, mais il est difficile de les standardiser en ce qui concerne la dimension temporelle du traitement et les résultats attendus en termes d’objectifs. Les courants de santé et de politique sociale ne contribuent pas toujours à simplifier l’accès au traitement. Il serait souhaitable que la recherche sur les soins soit bien conçue dans ce domaine. Il faut des offres thérapeutiques durables et professionnelles avec suffisamment de variations, car en psychothérapie notamment, le même setting ne peut pas être appliqué à tous les patients.
Messages Take-Home
- Les troubles psychiatriques et psychosomatiques sont très fréquents dans la pratique et doivent toujours être inclus dans le diagnostic différentiel.
- En cas de nombreux examens somatiques “sans résultat”, il faut s’orienter vers le psychodiagnostic.
- Des formations continues dans le domaine de la communication (par exemple, l’entretien motivationnel, également pour les équipes) peuvent être très utiles au quotidien pour tous les professionnels de la santé.
- Les cliniques proposent des traitements intensifs et multidisciplinaires axés sur la psychothérapie ; pour les cas complexes, il vaut la peine de prendre contact directement et de discuter du cas (éventuellement avec un entretien préalable).
- Actuellement, l’approche de la santé et de la société en matière de maladie mentale n’est pas uniforme et ne facilite pas le traitement.
Littérature complémentaire :
- Van Spiek P : La médecine : à la recherche d’une nouvelle vision de l’homme. Bulletin des médecins suisses 2018 ; 99(19-20) : 633-634.
- Symposium de la clinique privée Hohenegg : La psychothérapie comme rituel de guérison – les facteurs d’efficacité communs. 2017.
- Miller WR, Rollnick S : Entretien motivationnel.
- Lambertus 2015.
- Stapel S : Efficacité de la thérapie comportementale en milieu hospitalier pour les troubles dépressifs en psychosomatique hospitalière. Pratique de la médecine comportementale clinique et de la réadaptation 2014 ; 27(cahier 2) : 120-153.
- Kurt H, et al. : Champs de tensions entre psychosomatique et psychiatrie. Der Nervenarzt 2012 ; 83(11) : 1391-1398.
- Gross LJ : Activation des ressources et succès thérapeutique en psychosomatique (semi-)hospitalière. Psychothérapie, psychosociologie, psychologie médicale 2015 ; 65(3-4) : 104-111.
- Rief W, Henningsen P : Psychosomatique et médecine comportementale. Schattauer 2015.
- Schürch F : Psychosomatique au cabinet du médecin généraliste : Guide de l’assistant médical. Huber 2013.
PRATIQUE DU MÉDECIN DE FAMILLE 2018 ; 13(9) : 23-26