Environ un tiers des patients présentent un risque accru de malnutrition ou sont déjà malnutris à leur entrée à l’hôpital. Un âge avancé et la présence de plusieurs comorbidités augmentent considérablement le risque de malnutrition associée à la maladie (MAM). Les maladies aiguës en particulier s’accompagnent souvent d’une réduction de l’apport alimentaire, par exemple en raison d’une perte d’appétit. Il en résulte une perte de poids.
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Environ un tiers des patients présentent un risque accru de malnutrition ou sont déjà malnutris à leur entrée à l’hôpital. L’âge avancé et la présence de plusieurs comorbidités (polymorbidité) augmentent considérablement le risque de malnutrition associée à la maladie (MAM) : dans certaines études, jusqu’à trois quarts des patients du groupe d’âge >65 ans présentaient un risque de malnutrition ou étaient déjà malnutris [1]. Les maladies aiguës en particulier s’accompagnent souvent d’une réduction de l’apport alimentaire, par exemple en raison d’une perte d’appétit. En conséquence, il y a une perte de poids : 5 % de perte de poids involontaire en 3 mois seulement signifient un statut nutritionnel réduit – soit 3,5 kg pour une personne de 70 kg. En combinaison avec une augmentation du métabolisme et des processus cataboliques, ainsi qu’avec l’augmentation des besoins en énergie et en protéines qui en résulte, le risque d’AMC augmente [2].
Le terme de malnutrition “associée à la maladie” indique ici les interactions : d’une part, la maladie entraîne une malnutrition. Les inflammations et les modifications hormonales (augmentation des concentrations de cortisol et réduction des concentrations d’hormones sexuelles), qui favorisent les processus métaboliques cataboliques, jouent un rôle essentiel dans ce processus [3]. D’autre part, la malnutrition peut avoir un impact négatif sur l’évolution de la maladie [1]. Des études montrent par exemple une forte association entre la MCA et une augmentation de la morbidité et de la mortalité, une prolongation de la durée d’hospitalisation et une diminution de la fonction physique. Pour les patients, la MCA est souvent synonyme de détérioration de la qualité de vie [4]. Il se forme une sorte de cercle vicieux dans lequel la malnutrition se renforce elle-même et peut être à la fois la cause et la conséquence de résultats indésirables. Par exemple, la cachexie est également un syndrome important chez les patients malnutris, par exemple chez les patients gériatriques ou oncologiques [1]. La cachexie est un “syndrome métabolique complexe” avec une perte de masse musculaire associée à la maladie, avec ou sans masse grasse [5]. Elle est notamment liée à des processus inflammatoires et à des modifications hormonales, ce qui réduit ou inhibe la synthèse des protéines musculaires et favorise par conséquent le catabolisme musculaire. La perte accélérée ou excessive de masse musculaire squelettique distingue la cachexie de l’AMC pure [5,6].
Rôle des médecins (généralistes) : De nombreux patients sont déjà malnutris ou présentent un risque accru de malnutrition à leur entrée à l’hôpital. Plus le diagnostic est précoce et plus le traitement est établi, meilleur est le pronostic. Les médecins traitent les patients avant et après leur séjour à l’hôpital. Les médecins (généralistes) ont donc un rôle central à jouer dans la gestion des MCA à tous les niveaux : de la prévention et donc de l’identification des facteurs de risque (section 2) et (du risque de) malnutrition (section 3), du traitement nutritionnel (ambulatoire) (section 4) jusqu’à la garantie du succès du traitement à long terme (section 5). La mesure régulière de l’évolution du poids joue un rôle essentiel à cet égard.
Comment prévenir la malnutrition et quels sont les facteurs de risque ?
Les patients présentant une cachexie prononcée répondent moins bien à la thérapie nutritionnelle. Par conséquent, et afin d’éviter les conséquences négatives d’une MAM, sa prévention est à privilégier par rapport à la thérapie. Si l’on réagit rapidement en cas de risque élevé de malnutrition, il est possible de prévenir une MCA prononcée [7]. La prévention est donc importante, surtout chez les patients à risque, par exemple en cas de tumeur primaire dans le tractus gastro-intestinal (perte de poids chez jusqu’à >80% des patients) [8]. Outre l’âge avancé, qui est le facteur de risque le plus important [9], et la polymorbidité, il existe d’autres facteurs associés à la MAMC chez les patients âgés (figure 1) [1,3,10–13]:
réduction de l’apport alimentaire, par exemple en raison de
- Perte d’appétit, par exemple en raison d’une anorexie liée à l’âge, d’une perception réduite du goût & de la soif, de processus inflammatoires/cachexie (par exemple en cas de cancer), de polymédication, de maladies gastro-intestinales
- difficultés de mastication et de déglutition, par exemple en raison d’une faiblesse musculaire
- facteurs psychosociaux, par ex. solitude, humeur dépressive, démence
- accès difficile à la nourriture (pauvreté des personnes âgées, mobilité/transport réduits & difficultés à cuisiner)
réduction de la digestion et de l’absorption, par exemple en raison de
- Maladies (gastro-intestinales), polymédication
situation métabolique catabolique avec des besoins accrus en énergie/protéines, par exemple en raison de
- Malnutrition, processus inflammatoires/cachexie (par ex. en cas de cancer)
- Immobilité/mobilité réduite
- Changements hormonaux
Immobilité/mobilité réduite, par exemple en raison de
- facteurs psychosociaux, pauvreté des personnes âgées
- troubles neurologiques ou psychologiques, limitation de l’ouïe/des yeux
- Perte d’équilibre
- Maladies de l’appareil locomoteur, (peur de) la douleur, diminution/faiblesse musculaire (due à la malnutrition)
Rôle des médecins (généralistes) : En raison du suivi à long terme et de leur rôle de premier recours, les médecins (de famille) ont, en tant que prestataires de soins primaires, un contact plus régulier avec les patients âgés que l’hôpital. Dans leur pratique, les facteurs de risque peuvent donc être régulièrement contrôlés et détectés à un stade précoce. L’objectif des mesures de prévention à mettre en place à ce moment-là est d’éviter une MCA. Les mesures possibles sont par exemple l’information et la sensibilisation ainsi que les premières propositions d’optimisation de l’alimentation, par exemple une sélection ciblée d’aliments riches en protéines/nutriments et leur intégration comme collations (voir section 4) [2,7].
Comment détecter une malnutrition ?
La malnutrition est multifactorielle, c’est pourquoi il n’est pas possible de se baser sur un seul paramètre pour le diagnostic. C’est pourquoi des outils de dépistage ont été développés pour déterminer s’il existe un risque de malnutrition, par exemple le Nutritional Risk Screening (NRS-2002), le Mini Nutritional Assessment® (MNA), le Subjective Global Assessment (SGA) ou le Malnutrition Universal Screening Tool (MUST). Ils ont été validés pour différentes populations de patients et différents settings et sont utilisés en conséquence [7].
Si le dépistage révèle un risque de malnutrition dans un premier temps, il est suivi d’une évaluation individuelle pour établir le diagnostic. La Global Leadership Initiative on Malnutrition (GLIM) a développé un schéma de diagnostic à cet effet (figure 3) : Dans le cadre de l’évaluation, des critères phénotypiques (perte de poids involontaire, IMC bas et masse musculaire réduite) et étiologiques (réduction de l’apport alimentaire et inflammation, maladie aiguë ou traumatisme) sont relevés. Pour établir le diagnostic, il faut qu’un critère s’applique à chaque cas. La classification de la gravité se fait en fonction des critères phénotypiques [14].
Rôle des médecins (généralistes) : Le MUST est recommandé pour le dépistage de la malnutrition dans le cadre des soins ambulatoires (figure 2). Un score est établi à partir de l’indice de masse corporelle (IMC), de la perte de poids et de la privation de nourriture, ce qui indique le risque de MCU. En fonction de ce risque, des mesures doivent être prises et, si nécessaire, un diététicien doit être consulté. Le dépistage est également répété régulièrement chez les patients à faible risque (par exemple, chaque année chez les personnes âgées de >75 ans). Si le risque est moyen, une surveillance plus étroite devrait être mise en place [15].
CAVE : les personnes en surpoids peuvent également souffrir de MCA, car le poids corporel n’est pas le seul facteur à jouer un rôle dans son apparition – l’évolution du poids et l’absorption de protéines et de micronutriments sont déterminantes. Dans ce contexte, l’obésité sarcopénique, qui se caractérise par une masse musculaire réduite et une masse grasse élevée, est particulièrement pertinente. Cependant, le risque est souvent sous-estimé. Le poids corporel pur ne permet pas de déterminer la composition corporelle et l’évolution du poids. Or, ces deux paramètres sont déterminants dans l’apparition d’une MAM, qui peut également survenir en cas d’obésité et influencer négativement l’évolution de la maladie. Il convient donc d’y prêter une attention particulière et de ne pas laisser une MAM non traitée comme une perte de poids souhaitée [2,16].
Pourquoi et comment traiter la malnutrition ?
Comme nous l’avons mentionné au début, la MCA a un impact négatif important sur l’évolution de la maladie et la qualité de vie. [17]Des études cliniques montrent qu’une intervention nutritionnelle thérapeutique améliore de manière rentable divers résultats cliniques, augmente la qualité de vie et réduit ou évite les hospitalisations. Une méta-analyse portant sur 27 essais contrôlés randomisés (ECR) inclus et 6803 patients confirme l’influence positive de la thérapie nutritionnelle. La mortalité et les réadmissions non planifiées à l’hôpital ont été réduites de 27% et 24% respectivement chez les patients hospitalisés grâce au traitement nutritionnel [18]. Dans une grande étude suisse (Effect of early nutritional support on Frailty, Functional Outcomes, and Recovery of malnourished medical inpatients Trial, EFFORT ), la thérapie nutritionnelle individuelle a même permis de réduire la mortalité de 35% chez des patients polymorbides et majoritairement âgés présentant un (risque de) malnutrition [19]. 82% de ces patients étaient âgés de plus de 65 ans.
Si une malnutrition a été diagnostiquée, un traitement nutritionnel individuel est donc mis en place (Fig. 3). Comme pour toute intervention médicale, le patient est au centre de la planification et de la mise en œuvre de ce traitement. Leur information, la prise en compte de leurs intérêts et de leurs souhaits ainsi que leur consentement sont essentiels [20]. Des directives médicales ont été élaborées pour la mise en œuvre de la thérapie nutritionnelle, notamment pour les patients polymorbides ou gériatriques [21,22]. Il existe également des lignes directrices spécifiques pour les besoins liés à des maladies particulières, par exemple l’oncologie, les maladies rénales ou la nutrition parentérale à domicile [23–25]. Ils contiennent des recommandations d’action concrètes basées sur des preuves pour la pratique quotidienne. Les objectifs à long terme d’une thérapie nutritionnelle sont le maintien ou l’augmentation de la masse musculaire, de la fonctionnalité et de la mobilité, ainsi que de l’autonomie et de la qualité de vie. Pour ce faire, nous commençons par définir les objectifs nutritionnels individuels sur la base du bilan énergétique et nutritionnel et des besoins spécifiques à la maladie. Le bilan énergétique et nutritionnel résulte des besoins et des apports. L’apport alimentaire peut par exemple être déterminé à l’aide d’enquêtes alimentaires sur 24 heures et de protocoles alimentaires [2]. Il existe des directives générales pour la détermination des besoins, qui sont présentées ci-dessous (tableau 1) :
Énergie : il existe des méthodes de mesure (par exemple, la calorimétrie indirecte, qui est l’étalon-or) et des formules de calcul pour déterminer les besoins en énergie. Ces derniers sont particulièrement adaptés à la vie quotidienne en raison de leur simplicité et de leur rapidité d’utilisation [21]. Toutefois, leur précision est limitée en cas d’obésité extrême, de malnutrition sévère ou de patients en soins intensifs, par exemple [2]. Elles ne peuvent donc fournir qu’une orientation. La détermination des besoins doit également tenir compte du sexe, du statut nutritionnel, du niveau d’activité physique (PAL, Physical Activity Level) et du type/de la gravité de la maladie, ainsi que de l’acceptation et de la tolérance [21]. Contrairement aux besoins en protéines, les besoins en énergie ne sont généralement pas adaptés chez les patients obèses et malnutris. Ils sont nourris de manière isocalorique (c’est-à-dire en fonction des besoins calculés), car la perte de poids due à une MCA peut entraîner les conséquences négatives mentionnées, même en cas de surpoids [16].
Protéines : les protéines sont notamment essentielles au maintien de la masse musculaire. Pour les patients âgés, un apport quotidien en protéines allant jusqu’à 1,2-1,5 g/kg de poids corporel est souvent recommandé, mais au moins 1,0 g/kg [21]. Chez les patients souffrant d’une maladie rénale, les besoins en protéines doivent être déterminés en fonction de la maladie et du traitement et peuvent, dans certains cas, être de 0,8 g/kg [7]. En cas de surpoids selon l’IMC (>25 kg/m2), les besoins en protéines sont calculés à l’aide d’un poids normal adapté (tableau 1) [16].
Micronutriments : la malnutrition s’accompagne généralement de carences en micronutriments, qui peuvent toutefois survenir même en l’absence de MCA [26]. Des revues systématiques ont identifié chez les personnes âgées une prévalence élevée ou un risque accru d’apports insuffisants en diverses vitamines (A, C, E, B1, B2, B6, B12), calcium, magnésium, sélénium, iode et folate [27–29]. Le risque de carence augmente avec l’âge ainsi qu’avec le nombre de comorbidités et peut avoir de graves conséquences. Les causes sont, entre autres, une absorption réduite, par exemple en raison de changements physiologiques, de maladies (gastro-intestinales) et de la polymédication, ainsi que le maintien des besoins en micronutriments avec une réduction des besoins/absorptions énergétiques avec l’âge [11]. L’état de l’approvisionnement en vitamines et minéraux devrait donc être analysé, en particulier chez les patients malnutris, et toute carence devrait être compensée par des suppléments [21,26].
Liquides : la thérapie nutritionnelle comprend également le traitement ou la prévention de la déshydratation due à un apport hydrique insuffisant. Les besoins quotidiens en liquide sont d’environ 1,6 l pour les femmes âgées et 2,0 l pour les hommes. Cependant, les besoins peuvent varier : Par exemple, en cas de température ambiante élevée ou de perte de liquide due, par exemple, à la diarrhée ou à la fièvre, les besoins sont plus élevés, alors qu’en cas d’insuffisance rénale, par exemple, une restriction de l’apport est nécessaire. L’alimentation doit être ajustée en conséquence [21].
L’élaboration d’un plan alimentaire se fait ensuite par étapes (figure 3), en faisant appel à une équipe multidisciplinaire (médecin, diététicien, infirmier, orthophoniste, etc.). Les objectifs nutritionnels doivent être atteints le plus possible par voie orale. Il est possible, par exemple, de sélectionner des aliments riches en protéines et en nutriments et de les intégrer dans les collations, d’enrichir les aliments ou d’utiliser des aliments buvables spéciaux (suppléments nutritionnels oraux, ONS). Si l’alimentation orale seule ne couvre pas au moins 75% des besoins au bout de 5 jours, l’alimentation entérale (EE) est complétée par une sonde, le patient continuant à s’alimenter par voie orale. Ce n’est que lorsque les besoins ne sont toujours pas couverts ou qu’il existe des contre-indications à l’EE qu’une nutrition parentérale (complémentaire) via un cathéter veineux est indiquée [2]. Cependant, l’EP est moins physiologique, car elle ne passe pas par le tube digestif, et elle est associée à des risques de complications (surtout des effets secondaires métaboliques), des coûts et des efforts accrus. Les méthodes orales et entérales sont donc à privilégier, notamment pour préserver la structure, la fonction, l’intégrité et la motilité gastro-intestinales, qui peuvent sinon être affectées à long terme par une privation prolongée de nourriture [7,31]. Le traitement nutritionnel est régulièrement revu et adapté au cours de l’évolution. Si les objectifs d’alimentation ne sont pas atteints, il y a escalade vers le niveau supérieur. Dans ce cas, le niveau supérieur ne devrait être utilisé, si possible, que de manière complémentaire et temporaire [31].
Comment garantir le succès du traitement ?
Des études cliniques ont montré dans des suivis à long terme qu’un traitement nutritionnel interrompu à la sortie de l’hôpital n’a pas d’effet à long terme sur les résultats cliniques, par exemple sur la mortalité et les réadmissions à l’hôpital [32]. En revanche, une grande étude portant sur 652 patients âgés qui ont poursuivi la thérapie nutritionnelle en ambulatoire a obtenu une réduction de plus de 50% de la mortalité à 90 jours [33]. Une méta-analyse récente portant sur un grand nombre de patients et incluant des études récentes de haute qualité (RCTs), un effet positif sur la mortalité [34]. En particulier chez les patients atteints de maladies chroniques, souvent âgés, un traitement nutritionnel à long terme est donc indiqué au-delà de l’hospitalisation afin de maintenir son effet positif sur l’évolution de la maladie et la qualité de vie. Le suivi de la thérapie nutritionnelle au cours de l’évolution est essentiel pour vérifier si les objectifs sont atteints, pour détecter les complications à un stade précoce et pour procéder à des ajustements thérapeutiques si nécessaire. La thérapie nutritionnelle présente en principe peu de complications, mais elle n’est pas totalement dépourvue d’effets secondaires. Les effets secondaires ou les risques potentiels des thérapies nutritionnelles non orales vont du risque d’aspiration et des problèmes de tolérance (nausées, ballonnements, diarrhée, constipation) pour l’EE aux infections de cathéter et aux complications métaboliques pour l’EP. Il faut s’assurer qu’il n’y a pas de suralimentation ou de sous-alimentation due à un calcul erroné des besoins. Une complication métabolique particulièrement grave et potentiellement mortelle est le syndrome de réalimentation. Les électrolytes sériques et les symptômes cliniques (notamment tachycardie, tachypnée, œdème) doivent donc être surveillés chez les patients à risque de syndrome de réalimentation, en particulier au début d’un traitement nutritionnel. Les facteurs de risque incluent un IMC bas, une perte de poids involontaire, des périodes de jeûne prolongées, des déséquilibres électrolytiques antérieurs et une dépendance à l’alcool. Des précautions doivent être prises, en n’augmentant que prudemment et progressivement l’apport énergétique et hydrique et en le substituant par des micronutriments. Une aide à l’identification et au traitement du syndrome de reprotoxicité est fournie par des directives médicales standardisées [2,35].
Rôle des médecins (généralistes) : Les médecins (généralistes) ont un rôle important à jouer dans le traitement nutritionnel, même après la sortie de l’hôpital, en tant que premiers soignants. La qualité de la thérapie dépend avant tout de la transition entre l’hôpital et le traitement nutritionnel à domicile. La collaboration structurée entre l’hôpital et les prestataires de soins ambulatoires, par exemple les médecins libéraux, les prestataires de soins à domicile et les services de soins, est ici fondamentale. En particulier dans le cas de l’EE ou de l’EP à domicile, la planification précoce, la formation des patients et de leurs proches, la prescription et la fourniture en temps utile de nourriture et d’aides sont importantes. Les médecins (généralistes) sont donc un maillon essentiel dans la transition vers le traitement nutritionnel ambulatoire. Grâce à leur contact étroit et à long terme avec les patients, les médecins (généralistes) jouent également un rôle important dans le suivi et la détection des complications. Le suivi se fait par exemple en suivant à nouveau le schéma de diagnostic : mesures anthropométriques ainsi que relevé de la prise alimentaire, de certains paramètres de laboratoire et de l’état général. Si les interventions nutritionnelles ne permettent pas d’atteindre les objectifs, le traitement est adapté avec un(e) diététicien(ne) selon le schéma par étapes. Le succès à long terme d’une intervention nutritionnelle ne peut être assuré que si les responsabilités en matière de contrôle et de suivi sont définies [2,35].
Qu’est-ce que la nutrition personnalisée ?
Le diagnostic de la malnutrition décrit ci-dessus ne comprend pas de biomarqueurs spécifiques, car leur influence et leur signification exactes sont pour l’essentiel encore incertaines. Il est toutefois connu que le traitement d’une MCA doit s’orienter vers des objectifs nutritionnels individuels, comme indiqué ci-dessus, car les observations montrent que tous les patients ne réagissent pas de la même manière à la thérapie nutritionnelle. Toutefois, des paramètres tels que l’IMC et la gravité de la maladie n’offrent que des possibilités limitées à cet égard. Les multiples facteurs d’influence et interactions non alimentaires dans le cadre de la maladie constituent un défi particulier. La recherche clinique sur les biomarqueurs et les prédicteurs potentiels dans la thérapie nutritionnelle prend donc de plus en plus d’importance. Avec une meilleure compréhension de la physiopathologie, ces paramètres permettent de classer les patients en sous-groupes et de traiter leur MCA de manière personnalisée par sous-groupe [36,37]. Compte tenu des ressources limitées du système de santé, il peut également être utile et économique d’adapter le régime alimentaire à la réponse au traitement. Les prédicteurs prometteurs sont par exemple la maladie aiguë concrète et l’inflammation systémique (par exemple via la protéine C-réactive), la diminution de l’apport alimentaire et la dégradation musculaire (par exemple la force de poing) [7,38].
Conclusion
En raison de la prévalence élevée de la MCA, il est important que les professionnels impliqués soient sensibilisés et formés à ce sujet. Les médecins (généralistes) étant ceux qui traitent les patients le plus régulièrement et sur le long terme, leur rôle dans la gestion des MCA est essentiel. Les patients âgés sont des patients à risque, c’est pourquoi il est important de contrôler régulièrement leurs facteurs de risque et leur état nutritionnel. Des outils de dépistage et de diagnostic sont disponibles à cet effet. Dans l’idéal, cela permettrait d’éviter la MCA ou de la détecter et de la traiter à un stade précoce chez les patients ambulatoires. Enfin, en ce qui concerne la thérapie nutritionnelle, il est important de procéder par étapes et d’effectuer un suivi. La mortalité, la morbidité et la durée d’hospitalisation peuvent ainsi être réduites et la qualité de vie améliorée.
Messages Take-Home
- Les personnes âgées, en particulier, présentent un risque accru de malnutrition associée à la maladie (MAM). Jusqu’à trois quarts d’entre eux sont concernés au moment de leur entrée à l’hôpital.
- C’est pourquoi, surtout chez les patients âgés, les facteurs de risque doivent être recherchés dès le cabinet médical, l’état nutritionnel doit être surveillé et des mesures de prévention doivent être prises si nécessaire.
- L’outil de dépistage universel de la malnutrition (MUST) permet de détecter les MAM en ambulatoire. Le diagnostic est ensuite établi à l’aide des critères dits GLIM.
- Le traitement de la MCA se fait par étapes, sur la base du bilan énergétique et nutritionnel et des besoins spécifiques de la maladie, avec l’aide d’un(e) diététicien(ne).
- Pour garantir le succès du traitement, la thérapie nutritionnelle doit être poursuivie en ambulatoire. Le suivi du succès du traitement et des complications est important à cet égard.
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