L’anémie hémolytique auto-immune (AIHA) est causée par des auto-anticorps avec ou sans activation du complément. Le risque de complications thromboemboliques est souvent accru.
Dans l’AIHA de type chaleur, les corticostéroïdes sont considérés comme un traitement de première ligne ; dans l’AIHA de type froid, ils ne sont pas efficaces, contrairement au rituximab. S’il existe une association avec une maladie sous-jacente, son traitement doit être clarifié. Dans les cas d’AIHA avec anémie sévère, une transfusion sanguine peut être nécessaire en premier lieu, avec certaines précautions.
Les anémies hémolytiques sont dues à une destruction accrue ou prématurée des érythrocytes et font partie des anémies hyperrégénératives, c’est-à-dire qu’elles sont caractérisées par une augmentation compensatoire de l’érythropoïèse avec réticulocytose périphérique [1]. On distingue deux grands groupes d’anémies hémolytiques : les anémies corpusculaires et les anémies extracorpusculaires. L’état des patients peut varier considérablement en fonction de la vitesse de chute de l’hémoglobine. Outre la sévérité de l’hémolyse, l’évolution et le pronostic dépendent des causes spécifiques et de leur traitement. L’anémie hémolytique auto-immune (AIHA) fait partie des formes extracorpusculaires et acquises d’anémie hémolytique. Les érythrocytes recouverts d’auto-anticorps sont détruits par les macrophages. L’étalon-or pour le diagnostic est le test de Coombs (test direct à l’antiglobuline, DAT), qui sert de base à la classification selon l’isotype et les caractéristiques thermiques des auto-anticorps [2]. Un test de Coombs négatif n’exclut cependant pas définitivement l’AIHA [2]. Traditionnellement, les anticorps sont classés selon leur température de réaction optimale en anticorps de chaleur (température optimale de 37°C, principalement IgG) ou anticorps de froid (température optimale de 4-30°C, principalement IgM) [3].
On distingue les trois groupes d’AIHA suivants [4] :
- Anémie hémolytique auto-immune avec anticorps anti-chaleur (surtout IgG),
- Anémie hémolytique auto-immune avec anticorps anti-froid (surtout IgM),
- Anémie hémolytique auto-immune avec auto-anticorps mixtes ou bithermiques (anticorps de Donath-Landsteiner)
L’anémie hémolytique auto-immune avec anticorps anti-chaleur (WAIHA) représente environ 70% de tous les cas d’AIHA, l’anémie hémolytique auto-immune avec anticorps anti-froid (CAIHA) 20% et les autres présentent des auto-anticorps mixtes ou bithermiques.
Cas 1 : WAIHA avec indication de transfusion sanguine
Le Dr Gregor Stehle, médecin cadre dans le service d’hématologie de l’Hôpital universitaire de Bâle, a décrit le cas d’une femme de 67 ans sans antécédents médicaux, qui présentait les signes classiques d’une anémie hémolytique hyperrégénérative [5]. Afin de déterminer la cause de l’hémolyse, un test de Coombs et un test de recherche d’anticorps ont été effectués. Les deux se sont révélés positifs et le diagnostic final a été celui d’une anémie hémolytique auto-immune de type thermique (WAIHA). En cas d’aggravation de l’anémie mettant en jeu le pronostic vital, des transfusions sanguines peuvent être nécessaires. Celles-ci sont toutefois compliquées par la présence d’auto-anticorps. Dans le cas présent, il a été décidé de procéder à une transfusion en raison de la gravité de l’anémie. Le conférencier a conseillé de déterminer le groupe sanguin et les antigènes rhésus dans de tels cas et d’administrer la transfusion lentement et sous surveillance [5].
En ce qui concerne les options de traitement, la norme pour la WAIHA est l’administration de corticostéroïdes, par exemple la prednisone à une dose de 1,5 mg/kg par jour pendant 2 semaines, suivie d’un tapering sur une période de 8 à 12 semaines [6]. Les mécanismes d’action cités sont la suppression de la production d’auto-anticorps, la réduction de l’affinité des auto-anticorps et la diminution de la destruction des érythrocytes par les macrophages spléniques [7,8]. Si les corticostéroïdes s’avèrent inefficaces, le rituximab, un anticorps monoclonal anti-CD20, peut être utilisé. Le Dr Stehle a souligné que l’hémolyse est un état thrombogène. Dans le cas présent, il s’agit d’une explication possible de l’aggravation aiguë d’une dyspnée qui était auparavant lentement progressive [5].
Cas 2 : CAIHA dans le cadre d’une maladie lymphomateuse
Dans un autre cas, le Dr Stehle a parlé d’un homme de 67 ans qui se plaignait d’une baisse de performance, de faiblesse, de sueurs nocturnes et d’une dyspnée d’effort [5]. Il avait également perdu du poids et présentait un ictère. Il s’est avéré qu’il s’agissait également d’une hémolyse : l’hémoglobine était de 57 g/l ; les réticulocytes étaient supérieurs au double de la norme ; la bilirubine et les LDH étaient élevées. Le test de Coombs était positif. Par rapport au cas précédent, les anticorps anti-froid (IgM) étaient prédominants. La mesure du titre de l’agglutinine froide a confirmé le diagnostic de suspicion d’anémie hémolytique auto-immune de type froid (CAIHA). On distingue deux sous-types de la maladie des agglutinines froides :
- Aucune maladie primaire n’est présente : CAD = “cold agglutinin disease” (maladie des agglutinines froides)
- Symptôme d’une maladie primaire : CAS = “cold agglutinin syndrome” (syndrome des agglutinines froides)
La suite de l’enquête a montré qu’il s’agissait d’une CAIHA associée à un lymphome. L’immunophénotypage par cytométrie de flux a révélé une population de cellules B clonales à cellules matures (82% de tous les lymphocytes ; 58,5% de toutes les cellules nucléées ; lymphocytes absolus d’environ 15,5 g/l), compatible avec un lymphome non hodgkinien à cellules B. Un traitement par rituximab, un agent biologique, a été recommandé à ce patient.
Congrès : medArt Basel
Littérature :
- “Anémie hémolytique”, www.gesundheits-lexikon.com,(dernière consultation 21.08.2024).
- Barcellini W, Fattizzo B : The Changing Landscape of Autoimmune Hemolytic Anemia. Front Immunol 2020 Jun 3 ; 11 : 946. doi : 10.3389/fimmu.2020.00946
- Anémie hémolytique extracorpusculaire”, https://flexikon.doccheck.com,(dernière consultation 21.08.2024).
- “Anémie hémolytique auto-immune”, https://flexikon.doccheck.com/de,(dernière consultation 21.08.2024).
- “Examen de l’anémie”, Meet the Experts, MTE 309, Dr. med. Gregor Stehle, medArt, Bâle, 17-21.06.24.
- Go RS, Winters JL, Kay NE : Comment traiter l’anémie hémolytique auto-immune. Blood 2017 ; 129 (22) : 2971-2979.
- Rosse WF : Quantitative immunology of immune hemolytic anemia : II. The relationship of cell-bound antibody to hemolysis and the effect of treatment. J Clin Invest 1971 ; 50(4) : 734-743.
- Fries LF, Brickman CM, Frank MM : Monocyte receptors for the Fc portion of IgG increase in number in autoimmune hemolytic anemia and other hemolytic states and are decreased by glucocorticoid therapy. J Immunol 1983 ; 131(3) : 1240-1245.
- “Anémie hémolytique”, https://flexikon.doccheck.com,(dernière consultation 21.08.2024).
- Hemosurf, Dr. med. U. Woermann, Mme M. Montandon, Dr. med. P. Keller, www.insel.ch/hemosurf,(dernière consultation 21.08.2024).
- Ehrlich S, Wichmann C, Spiekermann K : Anémies hémolytiques auto-immunes. Dtsch Med Wochenschr 2022 ; 147(19) : 1243-1250.
- “Laboratoire et diagnostic”, www.labor-und-diagnose.de/k15.html,(dernière consultation 21.08.2024)
- “Test de Coombs” https://de.wikipedia.org/wiki/Coombs-Test, (dernière consultation 21.08.2024).
HAUSARZT PRAXIS 2024 ; 19(9) : 32-33 (publié le 18.9.24, ahead of print)