L’isotrétinoïne orale permet de traiter très efficacement les formes sévères d’acné qui ne répondent pas suffisamment à l’antibiothérapie topique et systémique. Au préalable, les patients doivent être informés des risques d’effets secondaires et des contre-mesures possibles. La plupart des effets secondaires sont réversibles et dépendent de la dose, mais des contrôles médicaux réguliers doivent être effectués.
Alors que les patients souffrant d’acné vulgaire légère sont principalement traités par voie topique, les cas modérés à sévères nécessitent souvent l’utilisation de produits à action systémique (antibiotiques oraux, traitements hormonaux, isotrétinoïne orale). Les directives européennes actuelles recommandent l’utilisation de l’isotrétinoïne orale, notamment en cas d’acné papulopustuleuse/nodulaire modérée ou sévère (figure 1) et d’acné conglobata [1]. L’isotrétinoïne est une substance qui a fait ses preuves en Europe depuis plus de deux décennies dans le traitement de l’acné. Utilisée à des doses suffisantes et pendant une durée de traitement suffisante, elle permet souvent d’obtenir une absence durable de manifestations après l’arrêt du traitement [2]. En Suisse, l’isotrétinoïne orale est utilisée avec succès dans les formes sévères d’acné depuis les années 1980 [4].
Une arme très efficace dans la lutte contre l’acné sévère
Une composante essentielle de l’accompagnement des patients acnéiques consiste à les informer des chances et des risques du traitement à l’isotrétinoïne [3]. Vincenzo Bettoli, Università di Ferrara (I), a conseillé une évaluation différenciée des bénéfices et des risques et a souligné qu’un traitement efficace et précoce de l’acné est utile et important à bien des égards – notamment pour minimiser le risque de cicatrices physiques permanentes et améliorer la qualité de vie des personnes concernées [5,7]. L’isotrétinoïne est un dérivé de la vitamine A à large spectre d’action. Il inhibe durablement l’activité des glandes sébacées et régule la kératinisation de la couche supérieure de la peau, qui est à l’origine du développement de l’acné. Plusieurs facteurs pathogéniques clés de l’acné sont influencés : l’hyperkératose intrafolliculaire, la séborrhée androgéno-dépendante, l’hypercolonisation microbienne par Propionibacterium acnes (Fig. 2) ainsi que l’inflammation et la réponse immunitaire. Les résultats des études confirment qu’il s’agit d’une option de traitement très efficace. La plupart des effets secondaires de l’isotrétinoïne peuvent être facilement prévenus et/ou traités, l’important étant de tenir compte des caractéristiques individuelles des patients. Un examen du profil bénéfice/risque de l’isotrétinoïne orale basé sur des études randomisées portant sur un total de 760 patients a montré que seuls 12 participants à l’étude ont interrompu le traitement en raison d’effets secondaires [6].
Régime de dosage individuel pour des résultats thérapeutiques durables
Les lignes directrices européennes proposent une dose de 0,3-0,5 mg/kg/jour pour l’isotrétinoïne orale en cas d’acné papulopustuleuse/nodulaire modérée ou sévère et ≥0,5 mg/kg/jour en cas d’acné conglobata [1]. Le professeur Bettoli, se référant à des résultats scientifiques, indique qu’une dose initiale faible de 0,1 à 0,2 mg/kg/jour, soit environ 10 mg par jour, et une augmentation progressive jusqu’à la dose maximale tolérée par le patient, est un moyen efficace d’obtenir de bons résultats cliniques tout en minimisant les effets secondaires par rapport à une dose standard de 0,5 mg/kg/jour. [5,7,8]. Avec cette approche, les effets du traitement sont un peu plus longs à se manifester, mais les effets secondaires sont moins importants.
Le traitement par isotrétinoïne orale doit être poursuivi un mois après l’absence d’apparition afin d’obtenir une “clairance” à long terme. En général, on recommande une durée de prise d’au moins six mois et une dose cible (dose totale cumulée, DTC) de 120-150 mg/kg de poids corporel [3]. Dans une étude de Borghi et al. il n’y avait pas de différence significative que la dose cible soit de 120 ou 150 mg/kg PC [10].
Une gestion adéquate des effets secondaires favorise l’observance
Une complication possible de la prise orale d’isotrétinoïne est l’aggravation de l’état de la peau au début du traitement. Dans la plupart des cas, ce “flare” disparaît en deux ou trois semaines. De plus, comme l’isotrétinoïne inhibe la production de sébum, elle peut entraîner une sécheresse de la peau et des altérations des muqueuses (chéilite sèche, dermatite faciale). Un traitement topique relipidant peut compenser la sécheresse de la peau, et les patients doivent recevoir des conseils sur les soins des lèvres et les mesures à prendre contre la sécheresse oculaire. La chéilite est un effet secondaire typique de l’isotrétinoïne et indique que le traitement est efficace. Il s’agit d’un effet secondaire lié à la dose. Les résultats des études montrent que la cheilite n’affecte pas la qualité de vie de la majorité des patients acnéiques [11]. Les patients doivent également être informés que la peau traitée à l’isotrétinoïne est sujette à la photosensibilité, d’où l’importance d’une protection solaire adéquate (par exemple, des préparations avec un indice de protection 50+). Un résumé des mesures d’accompagnement recommandées pour les soins de la peau/du corps est présenté dans le tableau 1 [5].
En ce qui concerne les contrôles de laboratoire, il convient de vérifier les enzymes hépatiques et les lipides (cholestérol, triglycérides) dans le sérum au début du traitement, un mois après et tous les trois mois pendant le traitement, car une augmentation des transaminases et des lipides sériques est possible sous traitement par isotrétinoïne [3]. En raison de leur potentiel tératogène, les rétinoïdes sont contre-indiqués chez les femmes enceintes et une contraception est importante en âge de procréer.
Pas de lien de causalité avec les troubles dépressifs
Aucun lien de cause à effet entre l’isotrétinoïne et la dépression ou la suicidalité n’a pu être établi empiriquement jusqu’à présent [3,9,12] (encadré). Entre autres, des études de cohorte prospectives montrent que les pensées suicidaires et la dépression chez les patients acnéiques sont plus souvent dues à d’autres facteurs (p. ex. stigmatisation) qu’aux effets induits par la thérapie [3]. Le professeur Bettoli n’a pas observé à ce jour d’accumulation anormale de troubles psychiques chez les patients traités par isotrétinoïne. Pour dépister les symptômes psychologiques chez les patients acnéiques, l’orateur a recommandé de poser des questions sur l’état de santé général avant et pendant le traitement par isotrétinoïne orale, ainsi qu’après l’arrêt du traitement. Les symptômes psychologiques peuvent ainsi être pris en compte.
Congrès : Société suisse de dermatologie et vénérologie (SSDV)
Littérature :
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- Plewig G, et al.: Systemische Behandlung der Akne mit Isotretinoin: Aktueller Stand. Hautarzt 1997; 48: 881–885.
- Nägeli MC, Läuchli S: Acne vulgaris: Aktuelle Erkenntnisse zur Pathogenese und Therapieempfehlungen. Schweiz Med Forum 2017;17(39): 833–837.
- Swissmedic: Health Professional Communication (HPC): Sichere Anwendung von Retinoiden, Januar 2017.
- Bettoli V, et al.: Challenges and Solutions in Oral Isotretinoin in Acne: Reflections on 35 Years of Experience. Clin Cosmet Investig Dermatol 2019; 12: 943–951.
- Vallerand IA, et al.: Effficacy and adverse events of oral isotretinoin for acne: a systematic review. Br J Dermatol 2018; 178: 76.
- «The difficult acne patient: How to use Spironolactone and Isotretinoin», Prof. Dr. med. Vincenzo Bettoli, SGDV Jahresversammlung 09.11.2022.
- Borghi A, et al.: Acute acne flare following isotretinoin administration: potential protective role of low starting dose. Dermatology 2009; 218(2): 178–180.
- Erme AM, et al.: Association between isotretinoin and mood changes: myth or reality? An updated overview. Int J Dermatol 2013; 52: 499–500.
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- 12. Kridin K, Ludwig RJ: Isotretinoin and the risk of psychiatric disturbances: A global study shedding new light on a debatable story. J Am Acad Dermatol 2023; 88(2): 388–394.
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DERMATOLOGIE PRAXIS 2023; 33(1): 38–39